Critique du film The Nocebo Effect

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Par Super Seven

le 29/01/2023

SuperSeven :

Vivarium avait divisé presse et public à sa sortie. Cette proposition originale, aux évidents défauts d'écriture, laissait présager un certain potentiel de Lorcan Finnegan, ainsi que la certitude que le genre est le réceptacle parfait à ses nombreuses thématiques. Là où The Nocebo Effect surprend, c’est par sa capacité à confirmer ces prédictions, tout en s’éloignant quelque peu du style des films précédents de Finnegan.

Il se décide enfin à abandonner son côté petit malin et son cadre théorico-symbolique parfois grossier, et opte pour une histoire bien plus ancrée dans notre réalité, sans pour autant délaisser ses objets de réflexion. Dès lors, il parvient à lier le rapport au mysticisme à la culture des personnages, des environnements dans lesquels ils évoluent, tout en lui donnant corps à travers l’horreur qui s’en dégage. L'abstraction prend le pas au gré de séquences effrayantes, très signifiantes dans les parcours évolutifs des personnages et transcendant la pure dimension symbolique contrairement à ce qui était fait dans Vivarium.

The Nocebo Effect développe un véritable univers, notamment dans ses séquences tournées au Philippines qui permettent de comprendre la connexion intime entre Diana et les cultes. L'étonnante prouesse du récit est bien là, car ce rapport au mysticisme et la culture précisément présente là-bas agit en écho à l'autre thème majeur qu’est la surconsommation. Finnegan prône un retour aux sources, tant dans notre rapport aux produits qu'à notre propre corps. Les capacités de guérison "naturelles" de Diana trouvent dès lors un sens profond pour les personnages, dont la vision trop occidentale des enjeux les empêche de sortir de la vaste toile qui les emprisonne.

Cela sans succomber à la tentation de l’exotisation facile de la culture étrangère, grâce à un travail de recherches conséquent qui se ressent. Les tons chauds et colorés des Philippines qui s’entrechoquent à l'aspect plus froid de l’Irlande, marquant une vraie distinction entre les deux cultures, n’ont rien d’une idiote fétichisation mais révèlent plutôt une justesse dans l’approche des caractéristiques intrinsèques de ces pays. II y a là une véritable balade du spectateur dans sa connexion avec les personnages. Si, dans un premier temps, l’on doute de leurs intentions respectives, notre perception finit par changer du tout au tout, par une remise en question progressive de notre rapport au film dans ce qu’il montre et dit de ces protagonistes, puis une inversion totale de ce même rapport dans le dernier acte.

Enfin, fini les tableaux surréalistes inspirés de Magritte, Finnegan se réinvente par une approche visuelle plus pragmatique et viscérale, palpable. Loin des lourdeurs symboliques, celle-ci confère à The Nocebo Effect une atmosphère profondément angoissante qui emprunte même au body horror dans certaines séquences. La compétition 2023 de Gérardmer trouve là une de ses plus belles surprises, et Finnegan, lui, une réussite qui prouve le passage à un âge plus adulte de sa carrière de cinéaste.


Axel Journet

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