Critique du film Mandibules

logo superseven

Par Super Seven

le 04/02/2021

SuperSeven :

mandibules image 2.jpeg


Un an après « Le Daim », Quentin Dupieux revient avec une nouvelle bizarrerie, « Mandibules », sélectionnée à la Mostra de Venise. En raison du contexte actuel, le film n’a malheureusement pas encore pu profiter du grand écran et continue sa tournée des festivals, présent cette semaine à Rotterdam en attendant une réouverture de nos chères salles de cinéma …

Après le blouson au style de malade provoquant des pulsions meurtrières, le musicien et cinéaste nous déroule une histoire tout aussi extravagante : celle de deux pèquenauds trouvant une mouche géante dans le coffre d’une voiture volée, et décidant de la dresser afin de devenir riches. Le réalisateur n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il s’agit là de son neuvième long métrage, et nous plonge une fois de plus dans une quête de l’absurde provoquant chez le spectateur courts-circuits cérébraux et sourires béats. Il est parfois dur de se faire à l’idée que nous n’avons pas à comprendre ce qu’il se passe à l’écran. Dupieux – à l’instar d’autres réalisateurs adeptes du surréalisme comme Bertrand Blier ou encore Luis Buñuel – sait parfaitement user de son écriture ingénieuse et sa mise en scène ancrée dans le réel, rendant l’insensé crédible, et permettant au spectateur de se laisser aller pour profiter de ces enchainements loufoques d’évènements avec un étonnant plaisir.

Cependant, bien que maitrisée et toujours drôle, cette œuvre est peut être l’une des plus « sages » du metteur en scène. La continuité de l’histoire est presque trop logique en comparaison à ses précédents films, et passée la surprise du gigantesque insecte, il n’y a finalement plus grand chose de renversant. Peut-être sommes-nous trop exigeants en connaissant l'antériorité de ses projets, offrant des propositions plus extrêmes et jouissives, mais s’il reste agréable à regarder, « Mandibules » ressort comme une petite déception. Le cinéaste se défend de cette tournure dans sa filmographie en expliquant qu’il souhaite proposer des histoires moins sombres, plus dirigées vers la vie que la mort. Un renouveau dans sa carrière qui, bien que légèrement insatisfaisant cette fois, nous laisse espérer de belles choses pour la suite.

Néanmoins, certains bons points restent à relever, à commencer par le casting aussi étonnant que convaincant. Dupieux s’entoure d’une bande d’horizons divers, à commencer par Grégoire Ludig et David Marsais, le duo comique du Palmashow ayant démarré sur internet puis poursuivi à la télé. Habitués à jouer les idiots, on aurait du mal à imaginer quelqu’un d’autre à leur place de losers magnifiques tant l’alchimie est – depuis toujours – évidente entre eux. On note aussi le rappeur belge Roméo Elvis qui signe ici son premier rôle au cinéma.
Tous s’inscrivent parfaitement dans cette bulle de folie, et particulièrement l’actrice Adèle Exarchopoulos qui interprète un personnage ridicule à souhait, entraînant chez le spectateur des rires aussi sincères que nerveux.
Nous pouvons aussi souligner une photographie très soignée, rappelant par ses tons doux et pastels celle de la précédente œuvre de l’auteur. Il insuffle là une esthétique presque clipesque, qui crée un certain confort visuel renforçant cette sensation de se laisser embarquer dans cet univers pour 1h15.

En résumé, si nous ne sommes pas en présence du haut du panier de la filmographie Dupieux, « Mandibules » offre tout de même une fable sucrée qu’il est difficile de ne pas apprécier. Les nouvelles ambitions du réalisateur nous rendent d’autant plus curieux de découvrir la suite, qui ne devrait pas tarder à arriver puisque celui-ci est déjà en train de tourner son prochain long métrage intitulé « Incroyable mais vrai », marqué par le retour de sa collaboration avec Alain Chabat.


Taureau film sympa,


Pauline Jannon

mandibules image.jpg