Critique du film Lone Wolf

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Par Super Seven

le 03/02/2021

SuperSeven :

Imaginez un monde où chacun de vos faits et gestes sont épiés … Vous vous dites que c’est déjà le cas ? Poussez notre réalité encore plus loin. Des caméras dans vos détecteurs de fumée, dans chaque recoin de la ville, vos appareils électroniques en marche permanente pour vous enregistrer… Véritable intrusion dans la vie privée de tous, mais aussi formidable outil d’enquête pour la police. C’est ainsi que se présente « Lone Wolf » de l’australien Jonathan Ogilvie. Condensé d’images de surveillance, de conversations téléphoniques, de vidéos enregistrées par les personnages, … ce procédé nous plonge dans un tourbillon de paranoïa et permet de vraiment accrocher l’œil du spectateur et rendre les investigations captivantes.

Les techniques visant à utiliser les technologies modernes – ou du moins les distiller dans le récit – se voient de plus en plus dans le cinéma actuel, de « Searching » à « #JeSuisLà » en passant par « Unfriended » ; il s’agit en quelque sorte de l’héritage du « found footage ». «Lone Wolf» se démarque encore en originalité grâce à la multiplications des moyens de filmer utilisés, mais aussi son esthétique rétro-futuriste qui nous immerge dans un univers non sans rappeler le fameux « 1984 ». Il est d’ailleurs assez agréable de pouvoir apprécier des plans soigneusement composés et une ambiance d’une certaine beauté plastique à travers des images abimées de caméras amateurs.

Enveloppée dans cette forme ingénieuse, l’intrigue – plutôt classique – est très bien mise en relief et nous permet de rencontrer et apprendre à connaître chaque personnage d’une manière intime, presque gênante pour le spectateur. On en oublierait presque les investigations ayant mené à visionner ces images et la trame policière pour se concentrer plutôt sur les relations entre les protagonistes, leurs secrets et leurs mensonges. En position de voyeur, on se retrouve donc à vouloir épier le quotidien de personnes qui n’attisent pas spécialement notre sympathie. Cela semble plus dû à une écriture assez plate et fainéante des héros du récit qu’à une véritable volonté du réalisateur, se reposant parfois trop sur l’atmosphère et l’emballage de l’histoire. Malgré tout, un loup solitaire parvient à nous émouvoir et se détacher du reste : Stevie, jeune autiste à la surprenante clairvoyance sur le monde qui l’entoure, parvient à nous attendrir un peu plus à chaque extrait tourné de sa main et à créer un réel lien émotionnel.

Jonathan Oligivie cherche là à passer un message questionnant l’éthique et l’utilisation des technologies à des fins politiques. Si la morale sur notre société et l’évolution semble plutôt claire, celle s’attaquant au gouvernement reste balayée en surface vu le maigre intérêt porté aux jeux de pouvoir derrière ce récit. La finalité tombe un peu à plat du fait du manque d’attache voire même de curiosité envers les personnages du ministre ou du commandant de police, et fait donc souffrir le film de quelques longueurs dans sa dernière partie.

« Lone Wolf » ne se fait donc pas forcément remarquer pour son écriture, la morale du film pouvant presque se résumer aux mots moqueurs que l’on trouve sur les réseaux sociaux « On vit dans une société… », mais brille néanmoins par sa forme inventive et séduisante, parvenant à rendre palpitante une histoire qui n’a rien d’original. Un pari plutôt réussi donc, pour la prise de risque du réalisateur du côté de la mise en scène.


Pauline Jannon

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