Critique du film Jack Mimoun et les secrets de Val Verde

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Par Super Seven

le 28/10/2022

SuperSeven :


CHASSE SANS TRÉSOR


Pour la comédie d’aventure "Jack Mimoun et le Secret de Val Verde", Malik Bentalha et son équipe se sont offert un tournage luxueux dans la jungle Thaïlandaise. Hélas, le scénario et le storyboard sont restés à Paris.


Attention, voilà un titre à clé : Qu’est-ce donc que le Val Verde ? Seul le scénariste Steven E. De Souza le sait, lui qui a inventé cet Etat totalement fictif dont le nom apparait furtivement dans les films Commando et 58 minutes pour Vivre. Ce pays imaginaire devient ici une île hostile sur laquelle se retrouvent parachutés sans le vouloir Jack Mimoun (Malik Bentalha, aussi crédité à la réalisation en duo avec Ludovic Colbeau-Justin) “survivant de l’enfer“ de la TV – chez lequel on distingue sans peine une parodie de l’aventurier Bear Grylls –, assisté d’une bande de pied nickelés composée de son producteur ventripotent (Jérôme Commandeur, qui s’évertue à ruiner son talent dans les mauvais films), un ancien militaire à la gâchette facile (François Damiens) et une jeune étudiante à la recherche de son père disparu jouée par Joséphine Japy. Leur but ? Retrouver un trésor caché.

Jack Mimoun est vendu comme une comédie d’aventure. Demi-vérité. L’aventure est bien présente : temples enfouis, scarabées noirs qui se glissent dans les bottes, jungle épaisse, plans d’hélicoptères survolant des cascades sauvages, tigres menaçants... Le film fournit le spectacle attendu d’une production garnie d’un budget très confortable (15 millions) et se love dans le sillon des œuvres canoniques du genre - de A La poursuite du diamant vert à Indiana Jones – sans d’ailleurs avoir de réelle volonté d’en détourner les codes. Reste l’aspect comédie. Là, le spectateur est moins gâté. Souvent déconsidérée, remisée au placard des récompenses officielles (quelle est la dernière Palme d’Or proprement comique ? M.A.S.H ?), la comédie est sans doute pourtant le genre le plus difficile à exécuter. Elle exige non seulement une qualité d’écriture notable, mais aussi une mise en scène capable de réussir la transformation du gag écrit vers le comique visuel – et sonore. Sans ce couple opératoire, elle flageole et s’effondre, invariablement.
Or, sur ces deux plans, Jack Mimoun échoue, et dans les largeurs. Pourtant scénarisé par un auteur talentueux et capable d’inoculer une dose certaine de folie dans ses scripts (Flober, qui a officié, entre autres, sur La Flamme et Le Flambeau), le film semble constamment avancer avec le frein à main dans la pitrerie, bâillonné par un humour tout au plus gentiment teubé, conçu expressément pour un public d’enfants et d’ados encore boutonneux. Jamais il n’ose se laisser contaminer en entier par l’énergie lunaire et géniale de Damiens, qui étincelle lors de ses premières scènes, puis s’éteint peu à peu, englué dans un rythme d’une mollesse infinie. C’est là que se situe le poison fatal d’une entreprise coûteuse, bavant sur une grande distribution (près de 700 copies), ce qui la condamne, presque d’office, à un horizon puéril et inoffensif. D’autant qu’il est assez invraisemblable de constater combien la mise en scène liquéfie les – rares – bonnes idées. Une attaque de tigres en haut d’une cascade ponctuée d’une excellente réplique de Damiens se trouve bazardée par un montage indigne. Au mieux tout juste illustrative, la réalisation se montre incapable de dynamiser un minimum l’action ou les échanges entre les personnages, d’offrir une idée visuelle ou burlesque quelconque comme si l’énergie d’acteurs diversement inspirés (Benoît Magimel n’a rien à faire là) suffisait à fournir le carburant comique nécessaire pour se dispenser du travail de réfléchir à l’emplacement de la caméra. L’essentiel des gags tombent donc à plat, dans un rythme amorphe qui mène le film vers un twist final qui ne surprendra que ceux n’ayant jamais vu un film d’aventure de leur vie, c’est à dire personne.
Coup de grâce, Jack Mimoun s’achève avec la promesse d’une nouvelle aventure à venir. Il aurait déjà fallu réussir la première.


Alexandre Lehuby

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