Critique du film Disco Boy

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Par Super Seven

le 11/05/2023

SuperSeven :


« If you’ve seen one, you’ve seen them all » disait Kathy dans Chantons sous la pluie, à croire qu’elle s’adressait particulièrement à ce Disco Boy.

Aleksei est un jeune biélorusse qui fuit l’Europe de l’Est pour rejoindre le pays de ses rêves : notre belle et douce France. Évidemment, le voyage ne se passe pas comme prévu, et, évidemment, l’arrivée en France est difficile. Pour obtenir (sous condition) les papiers français, Aleksei s’engage dans la légion étrangère, et, encore une fois, évidemment, l’armée n’est pas d’un accueil très chaleureux. Évidemment oui, car tout semble évident, prévisible, déjà vu. Le récit est mis en scène par des idées simples, si banales qu’elles en deviennent universelles, et si mal amenées qu’elles frôlent le ridicule et le caricatural. Les emprunts sont si flagrants qu’on ne peut savoir d’où ils viennent. Nous savons que nous les avons déjà vu, mais où ? Surement dans un de ces énièmes films plutôt médiocres dont on ne garde qu’un souvenir inconscient, notre cerveau préférant retenir ceux qui en valent la peine. Les scènes d’entrainement militaires sortent tout droit d’une mauvaise reprise de Full Metal Jacket, et les expéditions au Niger exposent les fantasmes occidentaux d’une Afrique sauvage et dangereuse, de corps noirs bestiaux et sensuels, et d’hommes bons à crier, danser, ou tirer à l’arme automatique.

Aleksei, quant à lui, semble étranger, tant au sens psychologique qu’administratif du terme. Toujours tenu à distance, l’accès à ses émotions est difficile, pour ne pas dire absent, et rien ne transcende à l’écran. On n’éprouve rien, ni devant la mort de son camarade de voyage, ni devant les traumatismes de la guerre. Cet éloignement pose problème quand tout l’édifice est construit autour de ce que les soldats ressentent, et il est difficile de saisir pourquoi et comment les liens se nouent entre des individus qui ne se connaissent pas mais qui semblent intimement liés, comme par magie, après un simple regard. Du reste, tout autre personnage, aussi oubliables soient-ils tous, est défini, au mieux, par un uniquetrait de caractère, jamais trop loin du commun et de l’ordinaire. Le sergent de l’armée est un antipathique patriote qui crie sur ses soldats, le chef du groupe rebelle Nigérien est un grand noir réservé qui a tout le respect du « village ». Rien de nouveau sous le soleil, et rien qui convainc réellement. Le pire étant le moment où Giacomo Abbruzzese tente d’apporter, à partir de l’intériorité d’Aleksei, un propos anti-guerre, doublé d’un lien mystique entre le biélorusse et le nigérien, qui virent à la mauvaise philosophie utopiste à cause d’une réalisation qui manque d’habileté dans le développement de ces sujets.

Il y a toutefois dans Disco Boy quelques trouvailles, et des partis pris artistiques alléchants – comme l’utilisation de la caméra thermique pour filmer un combat au corps à corps –, mais le tout manque d’identité. Gardons tout de même l’espoir de voir un jour une œuvre puissante et singulière de ce réalisateur qui tente, ose, expérimente parfois, mais dont le cinéma – pour l’instant – peine à transcender.


Maxime Grégoire

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